Ka guerre est un crime, le tout est de s'en rendre compte... Feixing & Xuafing
    
    

Je frissonnai sous mon manteau. Cela faisait plus d’une semaine que j’étais parti du manoir familial pour retrouver mon général, qui était parti se battre. Je n’aimais pas du tout être loin de lui, surtout que ma mère en profitait pour vouloir encore et toujours me marier avec "un parti plus intéressant". J’avais donc décidé de partir à la recherche de mon amant et de m’assurer qu’il allait bien. En plein hiver. Ce n’était pas la meilleure idée du monde…

Les montagnes où il devait avoir été envoyé pour une bataille étaient enneigées et les nuits étaient très difficiles. Je me refusais à couper du bois pour faire du feu et devais utiliser ma magie, ce qui était au final éreintant.

Soudain, je vis une langue de feu illuminer le ciel et me levai d’un bond. Ils étaient là, tout près ! Je courus jusqu’à l’origine de la flamme, oubliant d’un coup le froid et la fatigue à l’idée de revoir Xuafing.

Je débouchai enfin sur une grande clairière. Le spectacle qui s’y déroulait était cauchemardesque…

Une partie des arbres autour étaient carbonisés ou flambait encore, le feu s’étendant de plus en plus. La plupart des combats, sanglants et meurtriers, se déroulaient dans les airs, mais certains avaient aussi lieu au sol ; Les cadavres et les blessés graves s’y étaient écrasés, et ces derniers poussaient des râles d’agonie à fendre les pierres. Quelques dragons défendaient ceux de leur camp à terre, les soldats debout se faisant de plus en plus rares.

Je sentis une nausée monter en voyant cela. Je n’avais qu’une envie, partir en courant. Mais il m’était psychologiquement impossible d’abandonner Xuafing seul dans cet enfer. Je pris donc une grande inspiration et me mis à courir au milieu du champ de bataille, slalomant entre les corps en cherchant et en appelant mon amant ; Des larmes coulaient à flot de mes joues à mesure que j’avançais. Mon don d’empathie me faisait ressentir la douleur de tous les êtres vivants aux alentours, du brin d’herbe au chêne centenaire, de la coccinelle au dragon de plusieurs tonnes. Leurs douleurs accumulées devinrent rapidement insoutenables et je me sentis hurler à m’en déchirer la gorge, le son étouffé à mes oreilles par les centaines de cris de souffrance profonde que je percevais dans mon esprit.

Je sentis mon corps chauffer et, dans un sursaut de conscience, compris que j’étais en train de puiser dans les lignes telluriques parcourant le sol pour avoir enfin la force d’arrêter tout cela. Des lianes énormes sortirent d’un coup de terre à une vitesse incroyable pour plaquer les dragons au sol, la gueule très bien muselée pour éviter de se faire carboniser, faisant attention à ne pas toucher à leurs blessures. La majorité de la souffrance qui me parvenait disparut et j’émis un léger soupir soulagé. Reprenant mes esprits, je me rendis alors compte qu’ils me regardaient tous avec une lueur surprise dans les yeux. Vexé, je sentis une fureur intense parcourir mes veines et commençai à crier :

"Non mais qu’est-ce-que c’est que ça , Vos parents ne vous ont-ils jamais dit que la violence ne résolvait rien ? Vous êtes des êtres civilisés, non , Alors conduisez-vous comme tels et parlez-vous, merde ! Vous vous rendez compte de veufs, veuves et orphelins que vous causez avec vos stupides guéguerres ?"

À chaque phrase, je faisais se resserrer les lianes sur leurs museaux (sauf ceux qui y étaient blessés, bien sûr), les faisant gémir sourdement.

"LU FEIXING !" entendis-je alors hurler.

Je me retournai et fis un petit sourire soulagé en voyant une haute silhouette approcher.

"Xuafing..."